Une page se tourne au Cromin : renouvellement d’une parcelle à Meursault
À Meursault, nous ouvrons un nouveau cycle au climat Le Cromin : la partie la plus ancienne de la parcelle laisse place à une vigne nouvelle. Pourquoi maintenant, comment procéder et ce que cela change — voici l’essentiel.
Dans une vie de vigneron, certaines décisions marquent un tournant. Renouveler une parcelle, c’est accepter qu’un cycle s’achève pour en démarrer un autre, au service de la qualité et de la pérennité. Au climat Le Cromin (Meursault), nous avons engagé cette démarche : l’arrachage ciblé de la vieille vigne (la partie la plus ancienne de la parcelle) afin de préparer une replantation réfléchie, fidèle à notre philosophie du respect des lieux.
Petit point d’histoire
Avant la Seconde Guerre mondiale, les ancêtres de la famille envisageaient d’arracher cette vieille vigne. La coutume voulait qu’avant l’arrachage on pratique une taille « à l’arrache » : on laissait une baguette plus longue pour augmenter le rendement de la dernière vendange. Ironie de l’histoire : cette taille vigoureuse a permis à la vigne de repartir, si bien qu’elle n’a finalement jamais été arrachée… jusqu’à aujourd’hui.
Contexte : une parcelle emblématique, à bout de souffle
La parcelle du Cromin concernée était l’une des plus anciennes du village — considérée par la famille comme la plus âgée de Meursault, âgée d’environ 140 ans. Elle a été plantée juste après la crise du phylloxéra (1878–1880) sur porte‑greffe riparia, par nos ancêtres qui ont reconstitué la vigne après l’épidémie. Au fil des décennies, malgré des soins constants et l’arrachage régulier des pieds morts, les pieds manquants se sont multipliés et l’expression du lieu s’est amoindrie : le moment était venu d’ouvrir un nouveau chapitre. Le reste de la parcelle demeure en place et continue d’être conduit et récolté.
Le mot du grand‑père
« Mon grand‑père m’avait dit que ces vignes dataient de 1878‑1880. C’est une page de l’histoire du domaine qui se tourne. » — Jean‑Claude Monnier.
Au cœur du domaine, une vigne de famille
Cette vieille vigne du Cromin est la seule parcelle attenante au domaine — elle communique directement avec nos bâtiments. C’est un lieu de vie autant que de travail, auquel tous les membres de la famille sont attachés. Même Rudy, le chien de la famille, y passe quotidiennement pour se dégourdir les pattes et accompagne souvent les ouvriers lorsqu’ils y travaillent.
RUDY, LE CHIEN DE LA FAMILLE DANS LE CROMIN, OCTOBRE 2025
Repères factuels
Localisation : Meursault — climat Le Cromin.
Âge estimé : environ 140 ans (plantations 1878–1880).
Opération initiée : 15 octobre 2025.
Pourquoi renouveler une vigne ?
Qualité et régularité : une vigne très âgée et très lacunaire finit par sous‑exprimer le climat ; replanter redonne de la cohérence au vin.
Sanitaire & pérennité : repartir sur des plants sains, adaptés au sol, pour protéger l’avenir de la parcelle.
Fatigue : il manquait trop de ceps ; la vigne était trop vieille et fatiguée.
Transmission : préparer une nouvelle génération de vignes qui portera le Cromin pour les décennies à venir.
Pourquoi ne pas se limiter à remplacer les pieds manquants ?
À l’époque, le sol était pioché à la main et la vigne plantée sans outils de guidage :
Rangs non parallèles, ceps pas toujours alignés : avec l’arrivée des tracteurs, certains pieds mal placés ont été arrachés lors des passages.
Enracinement peu profond (plantation manuelle) : lors des travaux du sol, les charrues du tracteur arrachaient parfois des ceps.
« Remontée » des ceps avec les coupes annuelles : certains pieds étaient devenus si hauts qu’il n’était plus possible d’attacher la baguette au fil.
Le cumul (vieille vigne très lacunaire + géométrie irrégulière + ceps trop hauts) rendait le travail laborieux : un renouvellement intégral de la zone ancienne s’imposait.
Arrachage des ceps à la pelle mécanique — opération qui remplace le défonçage au tracteur.
Analyse de terre : vérifier l’équilibre (matière organique, carences, calcaire/argiles…) pour choisir la plante de service (semis) et le porte‑greffe adapté.
Semis de couverture : plante de service (graminées ou légumineuses), selon les besoins, pour entretenir la parcelle et limiter les nématodes ; le but étant d’opter pour des espèces adaptées aux besoins du sol.
Repos du sol : au moins une bonne année, jusqu’à ce que les analyses valident sa préparation.
Plantation de la greffe : choisir un porte‑greffe adapté au sol (ex. tolérance au calcaire). À partir de la plantation, compter ~4 ans jusqu’aux premiers raisins ; rendements maximaux vers ~5 ans.
Cycle de vie : la vigne vivra en moyenne ~40 ans avant d’être à nouveau renouvelée.
Où en sommes‑nous au Cromin ?
Nous sommes à l’étape 3. Les analyses de terre (étape 4) et le semis (étape 5) interviendront au printemps 2026.
Les prochains mois seront dédiés au repos du sol et aux préparatifs de plantation sur la zone renouvelée. Les rangs conservés, eux, restent en production et continueront d’être vinifiés comme à l’accoutumée. Ce temps long fait partie de l’ADN bourguignon : prendre le temps qu’il faut pour que la vigne trouve sa place — et que le Cromin exprime à nouveau toute sa personnalité dans nos futurs millésimes.
Calendrier indicatif après replantation
Années 1–2 : pas de récolte ; la jeune vigne construit son enracinement et son architecture.
Année 3 : possible cueillette d’équilibre en très faible volume, si l’état des pieds le permet.
Années 4–5 : premiers volumes significatifs et premier millésime commercialisable selon la vigueur et le climat de l’année.